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Pâtisserie espagnole, entre tradition et modernité

Issue d’une tradition ancestrale et héritière de diverses cultures, la pâtisserie espagnole a su se préserver et est arrivée jusqu’à nous pour le bonheur des grands et des petits. Les évolutions, très prometteuses, gardent l’essentiel de ses racines traditionnelles.

La pâtisserie dégustée actuellement en Espagne est majoritairement un héritage des traditions culinaires arabe et juive. Elle s’est enrichie de deux produits arrivés d’ailleurs : le cacao ramené des Amériques et le café provenant d’Ethiopie. Ainsi, connaître la pâtisserie espagnole revient à connaitre l’histoire des civilisations qui ont marqué sa culture comme on peut le voir au musée « Goritxegui » à Tolosa (Guipúzcoa) qui retrace les racines de la tradition pâtissière espagnole.

Les ingrédients essentiels de la pâtisserie espagnole sont toujours : le sucre, la farine de blé, les fruits secs (amandes mais aussi noisettes et noix), le lait, le miel, la cannelle, le citron, le chocolat, l’anis (ou liqueur d’anis) et le cheveu d’ange. Ils font tous partie d’un gigantesque livre de recettes de pâtisserie dans lequel on peut retrouver des confiseries de grande célébrité: turrón de Jijona, mazapán de Toledo, soplillos alpujarreños, mantecados, alfajores, polvorones, tarta de Santiago, piononos de Santa Fé, ensaimada mallorquina, bienmesabe canario, tejas castellanas, hojaldres de Guarromán, sobaos pasiegos, casadielles asturianas ou crema catalana. Ces préparations, aussi variées qu’exquises, ne peuvent cependant pas nous faire oublier les desserts liquides, parmi lesquels se trouvent les horchatas, sorbetes, leches rizadas, chocolate ou natillas.

 

Mantecados

Mantecados

Durant des siècles, cette connaissance de recettes et de techniques pâtissières artisanales a été gardée, comme un vrai trésor, derrière les murs des cloîtres et couvents. Dans l’un d’entre eux, Sainte Thérèse d’Avila (sainte et pâtissière espagnole, en plus de Docteur de l’Eglise) expliquait que « Dieu était aux fourneaux ».

La pâtisserie des couvents est impressionnante: almendras garrapiñadas, bocaditos de angel, bizcochos de soletilla, tocinos de cielo, mantecados, obleas ou pastas flora sont quelques-unes des douces tentations que l’on peut trouver dans ces institutions, fruits des traditions arabes, chrétiennes et juives. C’est d’ailleurs étonnant que des noms faisant davantage référence au vocabulaire du christianisme proviennent de recettes héritées des arabes et des juifs. Peut-être pour les cacher ?

La dégustation de confiseries a toujours été fortement liée à la religion : l’année commence le 6 janvier avec le Roscon de Reyes et un grand nombre de fêtes catholiques possèdent une confiserie associée, souvent élaborée avec les produits excédents à la saison concernée: cuajadas au Carnaval, roscos lors de la Semaine Sainte, turrones et polvorones à Noël. Il y a même une confiserie qui porte un nom de pape: le pionono (pour PieIX), qui est un gâteau roulé.

La pâtisserie espagnole arrive au XXème siècle, caractérisé par des textures insoupçonnées, des technologies impensables, des formes insolites ou de noms indéchiffrables) sous les traits des grands noms de la cuisine internationale tel que celui de Cristina Arzak, meilleure cuisinière du monde 2012. Celle-ci nous offre dans son restaurant de Saint Sébastien des desserts pleins de suggestions: “Jugando a las canicas de chocolate” (en jouant aux billes au chocolat), “Sopa y chocolate entre viñedos” (soupe et chocolat dans les vignes), “Hidromiel y fractal fluido”(hydromel et fractal fluide), “Piedra de pistacho y remolacha” (pierre de pistache et betterave), “Helados” (glaces). Avez-vous remarqué ? Chocolat d’Amérique latine, hydromel, pistaches et betterave d’origine arabe … des recettes nouvelles avec de ingrédients anciens.

 

Photo : jlastras